Face à la profonde restructuration mondiale du système des transports: Quelle politique pour l’Algérie ?

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Le président de la  République lors du dernier Cconseil des ministres a dressé un bilan, sans complaisance, de la situation du secteur qui connaît d’importants dysfonctionnements se répercutant, négativement, tant sur l’économie que sur le citoyen. Il devient urgent d’avoir une vision stratégique qui passe par une coordination étroite entre différents départements ministériels, en associant tous les utilisateurs potentiels. Je me propose d’analyser le livre blanc de la Commission européenne, en matière de transport et les enseignements pour l’Algérie.

1.-Le rapport du livre blanc de la Commission européenne sur la politique du transport

1.1-Ce rapport part, au préalable, de cinq constats.

Premier constat : le retour à la croissance est un facteur structurel et durable de dynamisme de la demande de transports. Deuxième constat : l’accroissement des trafics concerne tous les modes de transport. Les transports se font, essentiellement, par les routes et la mer pour les marchandises, et par l’air pour les voyageurs. Celles de la voie d’eau et du chemin de fer étant souvent moins chers. Troisième constat : l’espace des transports apparaît très fragmenté, tandis qu’une part croissante des infrastructures arrive à saturation. Cette fragmentation et cette saturation concernent tous les modes : encombrement du ciel, concentration du trafic maritime, lenteur du fret ferroviaire. Quatrième constat : les politiques nationales des Etats en matière de transports restent peu coordonnées. Cinquième constat : l’intervention de l’Etat dans ce secteur est importante du fait que la rentabilité est, à moyen et long termes, surtout pour les investissements ferroviaires et supposant des infrastructures appropriées, le financement des réseaux reposant quasi exclusivement sur les ressources budgétaires. Or, la réglementation des transports est, depuis longtemps, d’origine internationale.

Ces règles mondiales ont pour objectif essentiel de faciliter les échanges et le commerce et tiennent, insuffisamment, compte des impératifs de protection de l’environnement et de sécurité des approvisionnements.  Depuis plusieurs années, cela a conduit certains pays, comme les Etats-Unis, à mettre en œuvre des réglementations régionalisées des transports, en particulier dans le domaine maritime ou aérien, en vue de promouvoir la défense d’intérêts spécifiques. L’Union européenne leur a emboîté le pas pour se protéger des catastrophes maritimes ou s’affranchir de règles inadaptées, comme en matière de lutte contre le bruit des avions ou l’indemnisation des passagers en cas d’accident. Aujourd’hui, avec l’élargissement, c’est-à-dire l’extension de la politique des transports et du réseau transeuropéen, à l’échelle d’un continent, la Commission européenne propose de repenser son rôle sur la scène internationale si elle veut maîtriser leur développement, de façon durable, et parer aux problèmes de congestion et de pollution. Dans le cadre des négociations menées à l’Organisation mondiale du commerce, l’Union européenne continuera à jouer un rôle de catalyseur pour l’ouverture des marchés des principaux modes de transport, tout en préservant la qualité des services de transport et la sécurité des usagers.

La Commission entend proposer de renforcer la place de la Communauté au sein des organisations internationales comme l’Organisation maritime internationale, l’Organisation de l’aviation civile internationale ou la Commission du Danube pour garantir, au niveau mondial, les intérêts de l’Europe. Une Union élargie doit pouvoir maîtriser les effets de la mondialisation et concourir à des solutions internationales pour lutter, par exemple, contre l’abus des pavillons de complaisance ou le dumping social pour le transport routier. Pour étayer l’ensemble des propositions à mettre en œuvre et qui sont la condition nécessaire mais non suffisante à la réorientation de la politique commune des transports face à l’exigence du développement durable, l’analyse du livre définit trois axes d’orientations.

1.2- Première orientation:

 La libéralisation, la sécurité et la clarification des priorités. Jusqu’à présent, pour la Commission, la politique des transports de la Communauté européenne a été, essentiellement, réglementaire, avec une priorité donnée à la libéralisation, la libéralisation restant difficile dans le transport ferroviaire. En ce qui concerne, par exemple, l’expérience européenne, la directive européenne  prévoit un accès aux réseaux nationaux limité aux regroupements internationaux d’opérateurs, ou à des «corridors de fret» bien définis. En pratique, le chemin de fer reste l’apanage de compagnies nationales, en situation de monopole. Parallèlement à son action de libéralisation et d’harmonisation, doit être définie une politique de sécurité, dans les transports, la coordination de transport restant, plus que jamais, une nécessité. Cette orientation s’est exprimée dans deux directions: d’une part; un encouragement à l’inter-modalité en général, c’est-à-dire principalement entre le chemin de fer et la route; d’autre part, une incitation au transport maritime, afin de décongestionner les axes terrestres. En ce qui concerne le financement, la Commission devrait mieux exercer le contrôle, dans le cadre de la politique de la concurrence, sur les interventions financières, dans le cadre de l’apurement de la dette des entreprises ferroviaires, les subventions aux ports maritimes, les affectations des redevances aéroportuaires et le financement des concessions autoroutières. Pour rendre efficiente cette coordination, la Commission reconnaît que la réflexion sur la politique des transports souffre d’une lacune statistique, ne disposant ni d’unités de mesure cohérentes pour le calcul de la tarification ou de la rentabilité des infrastructures de transport. D’où l’urgence d’une réorganisation de son outil statistique et économétrique

1.3 Deuxième  orientation

L’assainissement du transport routier et l’introduction des nouvelles technologies. Malgré sa domination commerciale écrasante par rapport aux autres modes de transport terrestres, la situation du secteur du transport routier reste fragile, comme sont venus le rappeler, récemment, les mouvements de protestation des routiers français, belges, néerlandais, britanniques et allemands.

Ce secteur est composé d’un grand nombre de petites entreprises, qui ne peuvent pas faire face aux pressions exercées pour abaisser les prix, en dessous du niveau qui serait nécessaire pour assurer leur stabilité financière. Ainsi, l’augmentation inattendue du prix des carburants n’a pas pu être répercutée par les entreprises de transport routier, du fait de la pression exercée par les chargeurs, entraînant une réduction significative des marges des transporteurs. Par ailleurs, le développement des systèmes de transport intelligents devrait être rapide et durable au cours de la décennie à venir : surveillance de l’infrastructure, gestion et contrôle du trafic, information, avant et pendant, le voyage, navigation et guidage, conduite automatique, gestion de fret et de flottes, billetterie et péage électronique, etc. L’enjeu essentiel est de faire converger les processus de programmation financière de telle sorte que les systèmes de transport intelligents puissent être mis en place de manière synchronisée.

1.4- Troisième orientation : une tarification appropriée

Il s’agit d’abord d’harmoniser et de compléter l’outil statistique afin, notamment, d’analyser les trafics et de calculer les coûts. Sur le premier point, la mise en œuvre du réseau de navigation par satellite Galileo et de systèmes de transport intelligents devrait permettre un suivi fin et en temps réels des trafics. Sur le second point, l’établissement de méthodes de calcul communes à tous les Etats membres constitue le préalable à une tarification au coût marginal social. Il s’agit, enfin, de renforcer la transparence financière. Actuellement, les bilans sectoriels des différents modes de transport restent, volontairement, confus, les Etats membres cherchent à dissimuler le montant exact de leurs contributions publiques. Ensuite, il s’agit d’abord de réduire les distorsions de concurrence dans les domaines techniques, fiscaux et sociaux. Celles-ci ont été avivées par la réalisation du marché unique des transports, et risquent de s’accroître encore après l’adhésion des pays d’Europe centrale et orientale. Il s’agit aussi, après avoir défini des principes communs de tarification pour les infrastructures de transport, de les mettre en pratique de manière harmonisée dans les différents Etats membres. Par ailleurs, au niveau international, l’on s’oriente, de plus en plus, concernant la tarification, en sollicitant l’utilisateur plutôt que le contribuable, par une tarification au «coût marginal social».  Cette tarification intégrerait, notamment, dans les prix des transports, les préoccupations environnementales. Mais aucune méthodologie commune n’a, encore, été arrêtée pour intégrer les aspects environnementaux dans les coûts des transports. D’où les recommandations de la Commission européenne d’une harmonisation de la fiscalité des carburants professionnels, en particulier pour le transport routier; le rapprochement des principes tarifaires d’usage des infrastructures, la prise en compte des coûts externes qui doit, aussi, encourager l’utilisation des modes de transport ayant un moindre impact environnemental et permettre des investissements, avec les recettes ainsi dégagées, dans de nouvelles infrastructures un encadrement moderne des systèmes de tarification de l’usage des infrastructures pour encourager de telles avancées, tout en assurant une concurrence équitable, entre les modes de transport et une tarification plus efficace et en permettant d’assurer le maintien de la qualité du service. Une telle réforme nécessite l’égalité de traitement entre opérateurs et entre modes de transport.

Que ce soit pour les aéroports, les ports, les routes, les voies ferrées et les voies navigables, le prix pour utiliser ces infrastructures devrait varier selon le même principe, en fonction de la catégorie des infrastructures utilisées, de la période de la journée, de la distance, de la taille et du poids du véhicule, et de tout autre facteur qui a une influence sur la congestion, la dégradation des infrastructures ou l’environnement. Dans bon nombre de cas, la prise en compte des coûts externes permettra de dégager un surplus de recettes par rapport à ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts des infrastructures utilisées. Pour tirer le maximum de bénéfices pour le secteur du transport, il sera crucial d’affecter les recettes disponibles à des fonds spécifiques nationaux ou régionaux afin de financer des mesures pour atténuer ou compenser les coûts externes (double dividende). La priorité serait donnée à la construction d’infrastructures qui encouragent l’inter-modalité, en particulier des voies ferrées, et offrent ainsi une alternative plus respectueuse de l’environnement afin de respecter les engagements internationaux  pour la réduction des émissions polluantes de CO2.

2.- Quelle politique de transport pour l’Algérie ?

2.1-L’Algérie a mis en place un important programme  de soutien à la croissance   dont une partie importante pour le développement d’infrastructures de base, à savoir : les Transports, les Travaux publics et les Ressources en eau (barrages et transferts). Ces projets constituent des enjeux pour la dynamisation de l’économie algérienne, impliquant différents opérateurs (ingénieries, constructeurs, opérateurs). La politique s’inscrit dans le cadre de la réforme globale et notamment de la libéralisation du secteur Transports qui visent à séparer l’activité de régulation de celle des services commerciaux dans le transport routier, urbain, ferroviaire et l’activité portuaire. La sécurité routière devant aller vers la création d’un système national de contrôle technique automobile. La dynamisation du transport, sous toutes ses formes, a un impact sur le développement local et l’attractivité des territoires comme l’important projet de l’axe Est-Ouest encore faudrait-il mesurer le coût qui est passé de 5, à 7, puis à 10 milliards de dollars US et, actuellement, estimé fluctuant, à plus de 13 milliards de dollars US. Quel sera le tarif du péage et surtout son impact économique et social d’une façon précise et datée et le coût de l’entretien? Et que penser de cette déclaration de hauts responsables algériens, à la fois d’un autre axe routier Est-Ouest mais, cette fois, desservant les Hauts Plateaux et un TGV entre l’Est et l’Ouest concurrençant cet axe routier, se chiffrant à des dizaines de milliards de dollars alors que les impacts ne sont pas encore évalués ? A-t-on analysé les opportunités en termes d’avantages comparatifs, si les ressources financières de l’Algérie, d’ailleurs limitées, étaient affectées à d’autres secteurs plus prioritaires (dont l’Éducation, la Santé, la promotion d’entreprises), inducteurs de croissance durable à moyen et long terme? Pour le transport aérien, certes le réseau est  relativement  développé, les grandes villes  étant  desservies, quotidiennement, par la compagnie nationale, ainsi que les dessertes internationales, mais s’impose   une profonde restructuration pour améliorer l’efficience de la compagnie Air Algérie qui croule sous le poids des dettes  avec  un niveau de services, relativement, médiocre. Quant aux liaisons maritimes, elles sont assurées par la Compagnie nationale algérienne  notamment Algérie Ferries). Depuis l’étranger les départs sont assurés à partir des ports d’Alicante, d’Alméria, Barcelone, Marseille, Sète avec comme ports d’arrivées , Alger, Oran   Ghazaouet, Béjaïa, Skikda. Malgré ses efforts, l’Algérie  n’arrive pas à émerger comme une nation maritime et elle risque de perdre ses acquis parce que le transport maritime devient, de plus en plus, inaccessible pour un pays du tiers monde. Actuellement, le pavillon algérien ne couvre que 11% des échanges.

La dépendance de l’Algérie à l’égard des armateurs étrangers paraît évidente,  rendant urgent l’amendement du Code maritime, afin d’ouvrir cette activité à des opérateurs privés très intéressés par le secteur maritime. Le grand problème qui se pose, actuellement, est que les ports algériens représentent le domaine public mais agissent, en même temps, comme entités commerciales. Pour les réseaux ferroviaires, l’Etat a décidé de consacrer d’importants montants financiers au secteur ferroviaire, aux métros, tramways ainsi que la réhabilitation des anciennes lignes. La SNTF devrait procéder au doublement et à l’électrification de certaines voies. Dans ce cadre, il serait souhaitable que le gouvernement réalise, graduellement, la séparation des fonctions de réalisation et de développement du réseau ferroviaire, tout en appuyant le recours à la concession et au partenariat étranger, pour améliorer la gestion.

2.2-. En ce qui concerne les réseaux de transport terrestre,  il est possible de se rendre, en Algérie, par voiture depuis la Tunisie, la Libye, la Mauritanie pour ce pays étant prévu le  projet de réalisation d’une route reliant Tindouf Algérie à Zouerate Mauritanie, sur une longueur de 775 km)   le Mali et le Niger à travers la route de l’Unité africaine  dont j’ai été officier d’administration entre 1971/1972 pour l’ axe Ghardaïa /El Goléa/ In Salah. La frontière terrestre entre le Maroc et l’Algérie est fermée, il est donc impossible de la franchir en voiture (la seule solution est de prendre l’avion). Durant les années 70 et 80, et pour les grandes villes, bien avant, toutes les villes moyennes ont créé leur opérateur de transport public étatique. Ces opérateurs ont été, pour la plupart, en situation de quasi-monopole sur le marché de transport urbain. Cette période a été marquée par une pénurie relative des moyens de transport. Financièrement, elles étaient soutenues par l’Etat, à travers les collectivités locales. A partir des années 90 et par manque de subventions, les entreprises de transports urbains connaissaient, de plus en plus, des problèmes financiers. Avec le  développement des transports informels qui est une réponse, aussi, aux dysfonctionnements du système de transport public Aujourd’hui, le transport par taxi clandestin est une activité tout à fait banalisée dans la plupart des villes algériennes. Leurs stations, improvisées, sont partout dans les différents quartiers des villes. Cette activité s’est développée et a explosé ces dernières années. La crise économique y est pour beaucoup de choses, certes, mais il y a, toutefois, lieu de rajouter d’autres considérations. En premier lieu, l’insuffisance de contrôle et de sanction. Ensuite, la possession du capital (la voiture) ne constitue pas véritablement en soi une barrière à l’entrée du marché, les clandestins offrant un transport à la demande, relativement meilleur marché, de jour comme de nuit. En fait, le transport terrestre est l’un des moyens de transport le plus usuel en Algérie. Que ce soit pour les voyageurs ou pour les marchandises, pas moins de 85% empruntent quotidiennement la route. Le transport doit être regroupé dans des entreprises et non artisanal qui sont dominants, par la création d’entreprises de grandes envergures  dans le transport terrestre. En 1988, il y avait 90% d’entreprises étatiques et 10% de privés. Actuellement, c’est le contraire mais avec une atomisation influant sur la rentabilité globale comme en témoignent les faillites et le non-remboursement de crédits de transporteurs individuels dans le cadre de l’ ex-ANSEJ.

2.3- Chaque mode de transport a des incidences sur la nature de l’énergie utilisée avec des impacts sur l’environnement.

La consommation du gasoil, du fait du bas prix bas, une partie étant importée avec l’essence sans plomb au prix international et cédé à un prix subventionné, et pour ses utilisations multiples dans l’Industrie et l’Agriculture, a explosé ces dernières années.  Une telle politique atteint ses limites. Aussi, une maîtrise de la demande de gasoil comme carburant, renvoie à la politique de transport tant pour les voyageurs que pour les marchandises, en encourageant les transports en commun, plus économes en énergie, ainsi que le transport par rail, dont il faut développer l’électrification. L’utilisation des transports en commun devrait être encouragée par l’Etat, aussi bien par un soutien direct à l’investissement dans cette activité, qu’au niveau d’une nouvelle politique tarifaire, en direction des usagers. En effet, une maîtrise de la consommation de carburants, nécessite, au-delà des options suggérées concernant les modes de transport, une politique des prix appropriée, en direction des autres usagers de la route. La gestion de la demande renvoie, en dernier ressort, à la question fondamentale de savoir quelle politique de prix des carburants adopter pour un pays comme l’Algérie? Car, toute politique des prix, pour s’inscrire dans la durée, doit permettre de couvrir l’ensemble des coûts directs et indirects, qui doivent être internalisés dans le prix des carburants sous forme de taxes, dont les recettes iront couvrir les dépenses d’infrastructures routières, et de protection de la santé des citoyens. Aussi une nouvelle politique s’impose, articulée essentiellement, autour de deux axes: d’une part, une diversification de l’offre par l’encouragement à l’utilisation de carburants alternatifs, comme les GPL, et les énergies renouvelables, d’autre part une maîtrise de la demande, dans le cadre d’une politique de développement durable, par l’internalisation dans le prix de l’ensemble des coûts induits par l’utilisation des carburants, dont le gasoil, fortement polluant. Il y a donc urgence de penser à un nouveau modèle de consommation énergétique. L’Énergie étant au cœur de la sécurité nationale, selon les prévisions tenant compte de la forte consommation intérieure et des exportations, l’objectif est un MIX énergétique. Il existe quatre solutions dont les trois premières sont intimement liées, pour rationaliser les carburants liés à un système d’information performant, au temps réel, mais qui s’applique à tous les produits subventionnés. Premièrement: aligner les prix sur ceux du marché libre mais parallèlement augmenter les salaires, supposant une nouvelle politique salariale, fonction à la fois de la production/productivité, de la structuration du revenu national par couches sociales et d’une péréquation intra-régionale pour un espace équilibré et solidaire afin qu’à terme existe un système de prix relatif équilibré qui n’induit pas un processus inflationniste.  Deuxièmement: aligner le taux de change officiel sur celui du marché parallèle afin d’atténuer les fuites hors des frontières, passant par la dévaluation du dinar officiel supposant des mécanismes de contre-chocs pour atténuer l’inflation importée et la fuite des capitaux. Troisièmement: définir une nouvelle politique axée sur un mix énergétique, conditionnée par une politique de régulation globale afin d’inciter les consommateurs à utiliser l’énergie la plus abondante dans le pays ( GNW- GPc ), une tarification appropriée permettant l’efficacité énergétique passant, notamment, par une nouvelle politique de l’habitat et une nouvelle culture des consommateurs. Quatrièmement comme cela se passe dans les sociétés en guerre et cela ne peut qu’être une solution transitoire, faute de mécanismes de régulation macro-économiques et macro-sociales, instaurer des bons par utilisateurs et régions mais sans un système d’information performant, avec le risque d’un développement important de la sphère informelle. Tout cela renvoie à une politique cohérente des transports qui est essentielle à la compétitivité économique, mais aussi aux échanges commerciaux, économiques et culturels, contribuant, également à rapprocher les citoyens; les uns des autres.

2.3- Comme cela a été mis en relief en Conseil des ministres, devant situer les responsabilités, au-delà des données statistiques qui peuvent être trompeuses, il faut replacer la faiblesse des impacts des transports et des infrastructures qui lui sont liées, à la mauvaise performance des dépenses d’investissement, en Algérie, étroitement liée aux carences en matière de gestion des dépenses publiques. Les déficiences observées dans son processus budgétaire et les goulets d’étranglement institutionnels ont systématiquement entraîné une mauvaise exécution des programmes d’investissement. Toutes ces insuffisances aboutissent à une mauvaise programmation, à la surestimation des dépenses et à de longs retards dans l’exécution des projets. De nombreuses décisions de projet ne sont pas fondées sur des analyses socio-économiques. Ni les ministères d’exécution, ni le ministère des Finances n’ont, suffisamment, de capacités techniques pour superviser la qualité de ces études, se bornant au contrôle financier effectué par le ministère des Finances, le suivi technique (ou physique) exercé par les entités d’exécution étant inconnu ou au mieux insuffisant. Les résultats des projets et programmes ne font pas l’objet d’un suivi régulier. Il n’existe aucune évaluation, a posteriori, permettant de comparer ce qui était prévu avec ce qui a été réalisé et encore moins de comparer le coût-avantage ou l’efficacité avec la situation réelle.

Il est évident que les enjeux institutionnels et de gouvernance contribuent, aussi, largement à limiter la réussite, en particulier dans les domaines du transport. Précisément dans le domaine des transports, les objectifs sont de moderniser et développer les services et systèmes de transport et d’améliorer l’intégration des modes de transport. Les objectifs de développement du projet sont de : (a) établir un cadre politique et institutionnel qui facilitera la participation privée dans l’infrastructure (PPI) ; (b) démontrer la viabilité de l’intégration des concessions dans les transports, à l’aide du lancement réussi du dispositifs BOT (Build-Operate-Transfer) ; (c) renforcer la capacité du gouvernement algérien à gérer et réguler le secteur des Transports et (d) réhabiliter les chemins de fer pour qu’ils contribuent mieux au coût efficacité du transport des personnes et du fret aux niveaux national, maghrébin et même africain supposant une volonté politique commune d’intégration. Concernant le transport, d’une manière générale, il faut tenir compte, certes, de la rentabilité sociale mais, également, des rentabilités réelles.

De ce point de vue, le transport routier possède l’avantage de pouvoir autofinancer ses infrastructures par les péages ou les recettes fiscales induites. A l’inverse, les infrastructures ferroviaires ou portuaires nécessitent un apport extérieur massif en contributions publiques.  En fin de compte, les enjeux futurs en matière de transport sont les suivants: réduire les circuits de distribution entre production et consommation; responsabiliser en faisant payer à chaque mode de transport son juste prix, en y intégrant les coûts externes qu’il induit dont le principe «pollueur/payeur», au travers d’une «pollutaxe»; sécuriser par des définitions de politiques sociales et environnementales pour protéger les travailleurs du transport – notamment routier et maritime – ainsi que les espaces naturels qu’ils traversent et enfin démocratiser par l’institutionnalisation du contrôle de la politique des transports, incluant la participation de la société civile.  Il serait intéressant, pour l’Algérie, de réaliser une étude sur le coût supporté par l’Etat, notamment, en matière de coût de la santé, du fait d’un mode de transport qui favorise la pollution sans compter les impacts négatifs sur l’environnement, et le coût des accidents de voitures. D’une manière générale, je note avec satisfaction, en ce mois de novembre  2022,  que les autorités du pays reprennent les actions préconisées de l’audit réalisée sous ma direction, assisté des principaux dirigeants et cadres supérieurs de Sonatrach, d’experts indépendants et du bureau d’Etudes de renommée mondiale américain -Ernest Young- réalisé entre 2006 / 2007 intitulé: «Une nouvelle politique de carburants, en Algérie dans un environnement concurrentiel».  Ayant été auditionnée par la Commission économique de l’Assemblée nationale populaire APN, en tant que directeur d’études de cette audit, j’avais attiré l’attention du gouvernement et des députés sur le gaspillage croissant de cette énergie et l’urgence d’une nouvelle politique de carburants axée sur le GPLc, le GNW (camions – bus – tracteurs) et l’utilisation du BUPRO qui ne nécessite pas la séparation du propage et du butane pour approvisionner certains utilisateurs (boulangeries-industries par exemple) et les zones déshéritées, dans les Hauts- Plateaux et le Sud. L’histoire nous a donné raison. Aujourd’hui, les signes de congestion, les nuisances environnementales et les accidents qui l’accompagnent s’aggravent, chaque jour, davantage et pénalisent autant les usagers que l’économie algérienne. Il est temps, en Algérie, de fixer à la politique des transports de nouvelles ambitions car génératrice de croissance et de création d’emplois.

En conclusion, la politique de tarification est au cœur-même de la politique des transports. Face à la concurrence internationale, mais également aux besoins interne (économie et citoyens) , qui devrait connaître de profonds bouleversements technologiques, renvoyant toujours à l’économie de la connaissance, cœur de tout processus de développement, et cela s’applique à l’ensemble du transport terrestre, (camions, tracteurs, voitures de tourisme- trains), transport aérien et maritime , dans la diversité de ses gammes, pour sa pérennité, doit tenir compte de sa rentabilité économique évitant des unités de prestige qui fermeront, à terme, aussitôt les subventions abandonnées. Devant voir une action coordonnée, tant à l’amont qu’à l’aval, toute politique des transports pour sa réussite passe nécessairement par une coordination interministérielle  et des actions complémentaires dans d’autres domaines: politique budgétaire, politique industrielle, d’aménagement du territoire ou encore politique sociale.

ademmebtoul@gmail.com

  1. M.