Guerre en Ukraine: Incursions: est-ce que la guerre se déplace en Russie ?

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Des frappes et des attaques de drone se sont multipliées ces derniers jours en Russie. Alors que Moscou dénonce l’absence de condamnation internationale, Kiev n’a jusqu’ici revendiqué aucune de ces attaques.

Un nouveau terrain de guerre ? Après un an et demi de conflit quasi-exclusivement sur le sol ukrainien, Moscou accuse Kiev de multiples attaques sur son territoire. Le dernier fait en date : la chute d’un drone «inconnu» sur la région frontalière de Belgorod qui a fait deux blessés. Cet événement survient quelques heures seulement après que l’armée russe a affirmé avoir repoussé une attaque d’envergure à la frontière par plusieurs dizaines de combattants venus d’Ukraine épaulés par des chars. Une attaque survenue là encore dans la région de Belgorod et qui a même fait réagir le Kremlin, assurant que celle-ci n’aura «aucune influence» sur la conduite de la campagne militaire russe en Ukraine. Si Moscou minimise ces événements, la situation n’en demeure pas moins inédite dans ce conflit où l’État qui en envahit un autre est désormais la cible de frappes, de drones et même d’incursion. De là à désormais parler d’une guerre en Ukraine et en Russie ?

Une «phase d’attente» avant la contre-offensive

Retour sur le dernier acte marquant de ce conflit qui ne cesse de s’enliser depuis quelques mois : la prise de la ville de Bakhmout par les forces russes qui a tout d’une victoire à la Pyrrhus pour Jérôme Pellistrandi. Le consultant défense de BFMTV souligne les pertes importantes côté envahisseur, d’autant que depuis «la ligne de front est figée». «Nous sommes dans une phase d’attente très curieuse, extrêmement compliquée à définir, une sorte d’entre-temps», observe le général sur BFMTV.com, rappelant que la contre-offensive ukrainienne «n’a pas réellement débuté». Les actions de ces dernières semaines, et notamment celle de deux drones abattus au-dessus du Kremlin à Moscou début mai, relèveraient donc davantage de la symbolique que d’une manœuvre militaire de grande envergure.

Aucune revendication de Kiev

L’historien militaire et ancien officier des troupes de marine Michel Goya n’est pas de cet avis. S’il estime, dans un entretien accordé à France info, que l’attaque de drones survenue cette semaine en Russie «s’agissait essentiellement de marquer les esprits», il affirme qu’«on est clairement dans la phase de préparation avant le jour J» de la contre-offensive. Pour le porte-parole de l’ambassade de Russie en France Alexander Makogonov, «il y a la volonté de provoquer la réaction de Moscou» derrière ces attaques. «La Russie se réserve toujours le droit à la riposte, mais la vengeance est un plat servi froid», a avancé le diplomate sur BFMTV mercredi soir. Pourtant Kiev n’a jusqu’ici «jamais revendiqué» la moindre attaque sur le sol russe et ce, pour une raison simple : les États-Unis ont fait savoir qu’ils ne soutiendront pas «les attaques à l’intérieur de la Russie», une position que partagent les autres alliés occidentaux. Si ces attaques suscitent des questions du côté ukrainien, elles interrogent tout autant du côté russe. Une nouvelle attaque aérienne sur Kiev a tué au moins trois personnes dont un enfant, ce jeudi. Si la capitale continue d’être visée par des frappes russes, celles-ci sont de plus faible ampleur que celles constatées au début du conflit en 2022. Stock de missiles au plus bas ? Instabilité militaire sur le front ? Si de nombreuses incertitudes demeurent, une chose est certaine pour Jérôme Pellistrandi : les soldats russes «subissent». La semaine dernière, un groupe de «sabotage» et «de reconnaissance de l’armée ukrainienne» a également été signalé à Belgorod par les autorités russes, causant diverses actions dans des localités de la région et provoquant le départ de civils. Là encore, la présidence ukrainienne a affirmé «ne rien à voir» avec l’incursion de ces combattants en Russie.

L’un accuse, l’autre dément. Et il est difficile de vérifier les propos de chacun. Quoi qu’il en soit, «il faut pour Moscou inverser le rapport de force et se présenter comme une victime des attaques de l’Occident» dans ce conflit, selon Jérôme Pellistrandi. Attaques de drones en Ukraine : pour Michel Goya, les Russes «n’ont plus beaucoup de missiles». Drones sur Moscou : le porte-parole de l’ambassade de Russie compare le «régime de Kiev» à «Daesh».

Le consultant défense de BFMTV ne croit néanmoins pas à une envie de conquête pour Kiev. «Quelles que soient la provenance de ces frappes, qu’il s’agisse de l’armée ukrainienne ou bien simplement d’opposants russes, l’Ukraine a décidé de couper les ponts avec la Russie», explique-t-il. Pour le général, la région de Belgorod s’apparente à un nouveau «rideau de fer», symbole de l’enlisement du conflit : «ce qui va débloquer cette phase, c’est la contre-offensive».