Le cours des hydrocarbures en 2023 et son impact sur les équilibres macro-économiques et macro-sociaux de l’économie algérienne

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Dans un monde incertain, connaissant un bouleversement inégalé, tensions géostratégiques, crise économique et sociale, réchauffement climatique, il y a lieu d’éviter les erreurs du passé, de l’illusion de la rente éternelle.

Étant une économie qui repose essentiellement sur la rente qui irrigue tout le corps social et économique, loin des discours stériles, souvent contredits par la réalité, selon la majorité des experts crédibles, pas les organiques attirés par une fonction de rente ou aux services de lobbys, les cours des hydrocarbures gaz et pétrole seront largement inférieurs en 2023 par rapport à 2022. Gouverner c’est prévoir à moyen et long terme au moyen d’une planification stratégique loin des actions conjoncturelles, les militaires différenciant très justement la stratégie des tactiques qui doivent s’insérer au sein de la fonction stratégique, s’imposent pour l’Algérie des stratégies d’adaptation

1 – Conséquence d’une économie mondiale en berne selon les prévisions du FMI pour 2023, y compris le taux de croissance de la Chine, loin des attentes, malgré toutes les actions de l’OPEP+, le cours du Brent connaît de fortes fluctuations ayant été coté, pour un cours euro dollar de 1,0882, le 17 mai 2023 à 12h GMT à 75,25 dollars pour le Brent et à 71,19 le Wit et le gaz naturel (plus de 33% des recettes de Sonatrach ) connaît une baisse de plus de 70% en référence au début du conflit en Ukraine où il avait atteint 250/300 dollars le mégawattheure et plus de 100 dollars début 2022 fluctuant depuis janvier 2023 entre 35/48 dollars le mégawatt heure, influant sur le rendement des projets. Afin d’éviter les erreurs du passé, de l’illusion de la rente éternelle, selon la majorité des experts crédibles, pas les organiques attirés par une fonction de rente ou aux services de lobbys, les cours des hydrocarbures gaz et pétrole seront largement inférieurs en 2023 par rapport à 2022. Le constat en ce mois de mai 2023 est que l’Algérie dépend pour 98% de ses recettes en devises des hydrocarbures, avec les dérivés inclus dans la rubrique hors hydrocarbures pour une valeur dépassant les 60%.

Les exportations de pétrole ont fluctué ces dernières années environ 450 000 /500 000 barils/j et entre 42/50 milliards de mètres cubes gazeux pour le gaz. La consommation intérieure est presque l’équivalent des exportations, pouvant absorber les 70/80% de la production à horizon 2030, devant accélérer la transition énergétique afin d’éviter le drame des effets de la baisse des cours entre 1986/1990. La hausse des prix du pétrole moyenne de 106 dollars le baril en 2022 selon la Banque d’Algérie et 16 dollars le prix du gaz a permis à Sonatrach d’avoir une recette de 60 milliards de dollars et des réserves de change clôturées fin février 2023 à 63 milliards de dollars. La dette extérieure est relativement faible de 2,914 milliards de dollars n’étant pas touchée par le relèvement des taux d’intérêts des banques centrales. Mais s’impose une rationalisation des choix budgétaires, évitant ces assainissements à répétition évalués à environ 250 milliards de dollars durant les trente dernières années à fin 2020 selon les données du Premier ministère, les banques malades de leurs clients, les entreprises publiques structurellement déficitaires , et plus de 66 milliards de dollars, pour les réévaluations ces dix dernières années(source APS). Par ailleurs, la loi de finances 2023 prévoit un déficit budgétaire de 5720 milliards de dinars soit au cours moyen de 135, dinars un dollar, environ 42 milliards de dollars. Parallèlement, la dette publique de l’Algérie est en nette croissance selon le FMI, 60,5% à fin 2022, avec des prévisions de 65,3% en 2023, contre 51,4% en 2020. Selon le rapport du FMI, l’Algérie aura besoin d’un baril de pétrole à 149,2 dollars pour assurer l’équilibre de son budget de 2023 contre 135 dollars pour 2021/2022 et 100/110 dollars pour 2019/2020. Dans ce contexte, l’on ne peut continuer à dépenser sans compter, où la dépense monétaire n’a pas été proportionnelle aux impacts économiques et sociaux avec plus de 1100 milliards de dollars entre 2000/2022 d’importations de biens et services en devises, sans compter les dépenses en dinars, (mauvaise gestion et corruption).

2 – Comme incidences avec la récession de l’économie mondiale qui touche la majorité des pays pour 2023 selon le FMI, le PIB en 2022 approche les 193 milliards de dollars et le taux de croissance serait de de 2,6% en 2023 alors qu’il faut un taux de croissance de 8/9% par an sur plusieurs années pour absorber le flux additionnel de demandes d’emplois d’environ 350 000/400 000 par an qui s’ajoute au taux de chômage actuel. Selon le ministre du Travail fin février 2023, 1900 000 ont été inscrits au chômage sur une population active d’environ 12,5 millions soit un taux de chômage de plus 15,2%, incluant les emplois improductifs, les emplois rente et les sureffectifs au niveau des administrations et des entreprises publiques, un taux proche de celui du FMI. Le taux d’inflation pour des raisons à la fois internes et externes, dont l’indice n’a pas été réactualisé depuis 2011, le besoin étant historiquement daté selon l’ONS depuis 2022 approche les 10 %, certains produits comme les pièces détachées de voitures ayant atteint les 200/300%, laminant le pouvoir d’achat. La valeur des importations du fait du déséquilibre offre/demande, avec les dernières décisions de débloquer les importations de matières premières et d’équipements, ces décisions bureaucratiques dans la précipitation sans cibles, qui ont paralysé tout l’appareil productif et accéléré les pénuries et l’inflation, seront largement supérieures en 2023 par rapport à 2022, avec des impacts sur la balance des paiements, du fait de la baisse des prix des hydrocarbures. Nos calculs donnent une estimation entre 50/55 milliards de dollars si le cours moyen est de 80/85 dollars pour le pétrole et 13/14 dollars le MBTU pour le gaz et entre 45/50 milliards de dollars si le cours moyen du pétrole est de 75 dollars pour le pétrole et 11/12 dollars le MBTU pour le gaz.

Ce sont les recettes devant retirer environ 25% des frais ainsi que la part des associés étrangers pour avoir le profit net restant à Sonatrach. Car , il faut être réaliste, en économie, la perte de temps ne se rattrape jamais, et paradoxe pour calmer transitoirement le front social, c’est une loi économise universelle, le versement de salaires sans contreparties productives conduit au suicide collectif par l’accroissement du taux d’inflation et du taux de chômage, pénalisant à terme les couches les plus défavorisées. Il faut être réaliste : sous réserve de la levée du verrou bureaucratique, de mobiliser le financement et pour certains projets de trouver un bon partenaire étranger, la rentabilité d’un projet mis en exploitation en 2023 nécessitera deux à trois années pour les PMI/PME et 5/7 ans pour les grands projets et chaque année de retard repousse les délais avec des surcoûts, où en économie le temps ne se rattrape jamais. Avant tout lancement d’un projet s’impose une étude de rentabilité précise, afin d’être concurrentiel au niveau international, devant privilégier pour les avantages financiers et fiscaux la balance devises et pour pouvoir exporter, il faut d’abord produire à un coût compétitif et un des continents le plus difficile à pénétrer contrairement à certains slogans du fait de la forte concurrence internationale, Chine, USA, Europe, pays émergent, est l’Afrique

3 – Existant un lien dialectique entre sécurité et développement, s’impose donc une planification stratégique 20323/2025/2030, afin d’éviter des pertes pour le pays qui peuvent se chiffrer en dizaines de milliards de dollars, et ce, tenant compte des nouvelles mutations mondiales des nouvelles filières qui se fondent sur la transition numérique et énergétique. Tenant compte des bouleversements mondiaux et des tensions budgétaires s’impose pour l’Algérie un langage de vérité afin de mobiliser la population autour d’un large front national, réalisant la symbiose Etat-citoyens. L’Algérie connaît la stabilité grâce aux efforts de l’ANP et des services de sécurité, mais en ce mois de mai 2023, Sonatrach, c’ est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach. Sous réserve d’une nouvelle gouvernance fondée sur de profondes réformes structurelles, l’Algérie a toutes les potentialités pour une croissance hors hydrocarbures afin de réaliser la nécessaire cohésion sociale et d’être un pays pivot au sein de l’espace méditerranéen, africain et au niveau des BRICS où l’Algérie a déposé sa candidature. La mobilisation citoyenne face aux tensions géostratégiques, le sacrifice devant être partagé, renvoyant à la morale est une question de sécurité nationale. Concilier l’efficacité économique et la justice sociale dans le cadre d’une économie ouverte, par la maîtrise du savoir, constitue le défi principal de l’Algérie. Le passage de l’État de «soutien contre la rente» à l’Etat de droit «basé sur le travail et l’intelligence» est un pari politique majeur car il implique tout simplement un nouveau contrat social entre la Nation et l’Etat.

A.M.