Trop de sport nuit-il au cœur ?

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Dans un entretien accordé par le Pr Pierre Croisille, directeur adjoint de l’unité de recherche CREATIS (CNRS 5220, INSERM 1206, Université de Lyon, Saint-Etienne), expert de l’imagerie fonctionnelle cardiaque et musculaire dans les sports d’endurance  dans lequel il a répondu  à cette question  et paru sur le site de «e.santé» il y a indiqué que tous les cœurs sont intrinsèquement adaptés à l’activité sportive, même s’il existe des aptitudes individuelles qui feront que certains d’entre nous, pour une même quantité d’entraînement, finiront par être des champions. Ce n’est plus le cas évidemment lorsqu’il existe une maladie congénitale cardiaque. Dans ce cas, l’attitude des médecins a beaucoup évolué et il est désormais admis que le sport a le plus souvent un effet bénéfique dans la plupart des situations, même complexes. Néanmoins, cela nécessite toujours un avis spécialisé. Par exemple, l’intensité de l’activité sportive autorisée dépendra toujours du bilan précis des anomalies présentes (ou résiduelles après une chirurgie) et l’on n’autorisera pas le même type d’effort si ces anomalies entraînent un surcroît de travail comme dans les communications entre les cavités cardiaques ou s’il s’agit d’un rétrécissement des vaisseaux pulmonaires ou aortiques. Par ailleurs, le sport n’est plus un interdit de principe chez les opérés du cœur, et même, il peut faire partie du traitement en améliorant par exemple l’oxygénation des tissus par des mécanismes compensateurs, tout en faisant bénéficier des effets cardioprotecteurs du sport. De même, ceux ayant des pathologies cardiovasculaires acquises devront privilégier les intensités modérées et les volumes d’effort physique raisonnables ; ils devront consulter un cardiologue spécialiste pour définir là encore, le type d’effort autorisé. Enfin, il existe toujours des cas de décès (mort subite) lors d’épreuves sportives, le plus souvent par des troubles du rythme graves, ne faisant que démasquer une maladie qui n’était pas connue. 95% des morts subites survenant lors de la pratique du sport sont d’origine cardiovasculaire, (mais pas dues au sport lui-même). Avant l’âge de 35 ans, ce sont des cardiomyopathies hypertrophiques, et plutôt des maladies des artères coronaires après 35 ans.

L’impact du sport intense sur le cœur

Chez les autres sportifs, sans pathologie cardiaque sous-jacente, on ne connaît pas encore l’effet sur le long terme des épreuves longues et intenses sur le cœur droit. En effet, la surcharge liée à un effort dans les cavités cardiaques droites induit des dilatations temporaires, mais on ne sait pas encore si elles sont à l’origine de pathologies générant des troubles du rythme ultérieurement.

Quels problèmes cardiaques proscrivent l’exercice physique ?

Les contre-indications au sport restent classiquement les cardiopathies congénitales, mais qui restent souvent relatives… Comme toujours, on pèsera le pour et le contre, entre le bénéfice d’un exercice modéré en aérobie (le sport d’endurance, où l’énergie utilisée par les muscles est essentiellement fournie par l’oxydation des sucres et des lipides disponibles) et le risque lié à un surcroît de travail pour un muscle déjà fatigué (par exemple en cas de cardiomyopathie dilatée/dilatation des cavités cardiaques) ou en cas de pathologie fortement arythmogènes (par exemple hypertrophie du cœur avec des palpitations apparaissant à l’effort). Le sport intensif de compétition sera alors le plus souvent proscrit, mais une pratique récréative de l’activité sportive peut malgré tout être accordée, avec une auto-surveillance. C’est le cas chez une personne présentant une maladie de toutes ses artères coronaires, si l’effort est modéré, en aérobie pure (environ 50% de la fréquence cardiaque maximale théorique) avec l’aide d’un cardiofréquencemètre pour apprendre à se connaître, et avec la consigne d’être à l’écoute attentive de son corps (palpitations, dyspnée, douleur thoracique). Les personnes qui pratiquent un sport de compétition ou intensif sont censées passer un examen d’aptitude à la pratique sportive chaque année, avec un examen clinique, un ECG et, au moindre doute, une échographie.

N.M.